2001 Privation Exhibition history /
Historique d’exposition
Statement / Démarche
And concerning the number of books, the establishment of libraries, and the collection in the Hall of the Muses, why need I even speak, since they are all in men's memories?
Athenaeus of Naukratis, [Comments on the destruction of the Great Library of Alexandria], Deipnosophistae, 90 AD
Last autumn, the National and University Library of Kosovo [sponsored by the Kosovo Foundation for an Open Society], conducted its own survey and found that two-thirds of Kosovo's 180 libraries had been "annihilated" between 1990 and 1999. Over 900,000 books — or almost half of all library books in Kosovo — had been destroyed. What has actually happened is that all ethnic Albanian material in Kosovo were removed from the libraries or fired or sacked about 10 years ago, and that no new books in the Albanian language have been acquired since 1991. And in this sense you might speak of ethnic cleansing in the libraries.
Carsten Frederiksen, [Deputy Director of the Library Federation], Rebuilding Libraries in Kosovo, March 02, 2001.
This project developed out of an event that my husband and I experienced several years ago when, as a consequence of a fire in our home, we lost almost our entire library representing some twenty-five years of collecting. The physical evidence of the loss, the remnants of books rendered unusable [safely stored with a company and now in my possession] have come to embody for me privation made visible.
Inevitably the images of the charred remains of books remind us of those libraries destroyed by fire, war, and cultural hatred; from the burning of the Great Library of Alexandria by Julius Caesar in 47 – 48 BC, the Nazi’s burning of “degenerate literature” on the night of Thursday, March 16, 1937 in Nuremburg, to the present day “ethnic cleansing” of all the libraries in Kosovo. These series of calamitous tragedies have forever erased histories, knowledge, and identities, both personal and cultural.
For the project Privation I have scanned the front, and back covers, of a selected number of the books damaged by the fire, leaving their content either hidden from view, or, at times, only alluded to through a title, a word, or part of an image. Using the scanner as camera, the resulting digital images of the book covers are printed via Gicclé printing process onto Arches paper.
In addition, an artist’s book based on the premise that each page, or each sheet of paper in the book replaces a burnt book [each page will show the front cover on one side and the back cover on the other –back– side] was printed and bound as an edition of 15 copies. The background of the scanned image has been eliminated to suggest that one is viewing an object. The pages/sheets become printed page and object, while the book represents a partial reconstitution of the lost library, demonstrating the randomness of the private collection as well as the randomness of the event.
Et concernant le nombre de livres, l’établissement des bibliothèques et la collection de la Salle des Muses, pourquoi même en parler, puisqu’ils font tous partie de la mémoire des hommes?
Athénée de Naucratis (commentaires sur la destruction de la Grande Bibliothèque d’Alexandrie), Le Banquet des sophistes, 90 apr. J.-C.
L’automne dernier, la Bibliothèque nationale et universitaire du Kosovo (commanditée par la Fondation Kosovo pour une Société ouverte) a mené sa propre étude et découvert que les deux tiers des 180 bibliothèques du Kosovo avaient été “annihilés” entre 1990 et 1999. Plus de 900 000 livres, ou presque la moitié des livres en bibliothèques au Kosovo, avaient été détruits. Ce qui s’est produit dans les faits, c’est que tous les ouvrages d’origine albanaise au Kosovo ont été sortis des bibliothèques ou brûlés ou pillés il y a environ 10 ans, et qu’aucun nouveau livre en langue albanaise n’a été acquis depuis 1991. Et en ce sens, on pourrait parler d’un nettoyage ethnique des bibliothèques.
Carsten Frederiksen (sous-directeur de la Fédération des bibliothèques), La Reconstruction des bibliothèques au Kosovo, 2 mars 2001.
Ce projet découle d’un événement que mon mari et moi avons vécu il y a quelques années; suite à un incendie dans notre maison, nous avons perdu presque toute notre bibliothèque; il s’agissait d’une collection que nous avions mis vingt-cinq ans à monter. La preuve matérielle de cette perte, ces restes de livres devenus inutilisables (entreposés façon sécuritaire auprès d’une compagnie et aujourd’hui en ma possession) en sont venus à incarner, à mes yeux, une privation rendue visible. Ces restes devraient inévitablement nous faire penser aux bibliothèques détruites par le feu, par la guerre et par la haine culturelle : depuis l’incendie de la Grande Bibliothèque d’Alexandrie par Jules César en 47-48 av. J.-C., en passant par la destruction par le feu de la “littérature dégénérée” qu’ordonnaient les Nazis la nuit du mardi 16 mars 1937 à Nüremberg, jusqu’au présent “nettoyage ethnique” de toutes les bibliothèques du Kosovo. Cette série de tragédies désastreuses a effacé à tout jamais des histoires, des connaissances et des identités, à la fois personnelles et culturelles.
Les thèmes de la perte, des identités culturelles, du livre ou de la bibliothèque et des archives sont présents dans ma démarche depuis le début, qu’il s’agisse de mon travail en photographie et/ou en design ou, plus récemment, dans celui impliquant mes archives personnelles. Ces dernières œuvres abordent des préoccupations architecturales (l’espace) et photographiques, aussi bien que des questions liées à l’institutionnalisation de l’art.
Pour le projet “Privation”, j’ai scanné les couvertures avant et arrière de certains de ces livres endommagés par le feu, tout en laissant leur contenu soit dissimulé du regard, soit seulement évoqué par un titre, un mot ou une partie d’image. Le scanner servant d’appareil photo, les images numériques des couvertures de livres qui en résulteront ont été tirées par le procédé d’impression Giclé sur du papier Arches.